jeudi 8 avril 2010

Tant de plaisir à jouer en famille

« Jouez en famille ! », c’est une pub pour des jeux de société aperçue à la télé, que je regarde si peu que vous allez peut-être me dire que cette pub paraît depuis longtemps…Mais pour moi, c’est nouveau.  Dans les années 80 déjà je me souviens d’une pub (pour le Trivial pursuit, je crois) où un malheureux joueur arrivé en retard attendait sous la pluie que les autres, passionnés par le jeu, prennent garde à lui et lui ouvrent la porte. Mais ce qui est nouveau, c’est le conseil : « Jouez en famille ! ». Dans la série Conseils aux consommateurs , après « à consommer avec modération » et « mangez des fruits », les jeux (pas les jeux vidéo, pas les jeux en ligne) trouvent une petite place, comme si tout à coup on s'apercevait de l'importance du jeu dans une vie équilibrée, on doit s’en réjouir je suppose.

On voit sur ce clip des enfants et des adultes qui se donnent rendez-vous pour jouer en fin de journée, et j’aime bien cette idée. On dit que le meilleur dans le week-end, c’est le vendredi, et c’est je crois un plaisir que nous nous offrons de moins en moins, celui de l’attente, du désir, du rêve de ce qui va arriver. 

Jouer en famille à un jeu de société, ce n’est pas très simple. Outre le fait qu’il faut trouver le temps, et le temps commun à tous, le problème est surtout de trouver le jeu qui convient. Il s’agit en effet de jouer tous ensemble. Or par définition, à l’encontre des joueurs qui jouent entre pairs, copains de classe ou de vacances, les joueurs « en famille », mis à part les jumeaux, sont d’âge, de compétence et de centres d’intérêt différents. Un des principes fondamentaux du jeu, c’est l’égalité des joueurs au départ, qui garantit  l’incertitude (le jeu au sens de jeu dans un engrenage). Si je joue avec des joueurs de niveau différents, que je sois sûre de perdre, ou sûre de gagner, le jeu n’a plus grand intérêt, on peut même dire qu’il n’y a plus de jeu.

Comment faire pour jouer pour de vrai avec un petit ? Normalement, j’ai toutes les chances de gagner, mais pour lui faire plaisir je fais en sorte que ce soit lui qui gagne. Croyez-vous que l’enfant soit dupe longtemps? Il voit bien que je le laisse gagner, ce n’est plus du jeu. Et qui plus est, pour qu’il gagne, je triche !

Pour jouer avec de jeunes enfants à égalité, il faut choisir des jeux où ils sont plus forts que vous, comme les jeux de mémoire, ou des jeux de hasard pur. Alors l’enjeu est réel, le jeu aussi. 
J'aime bien Papa Boa (Piatnik) (De petits serpents en bois articulé font la course pour rattraper leur papa. Le hasard nous fait avancer 2 serpents à chaque coup, et pas toujours "le nôtre").

Sinon, il faut trouver des systèmes de handicap, posés clairement avant de commencer à jouer, par exemple enlever une ou deux pièces aux échecs au plus fort, dès le début de la partie – mais souvent cela ne plaît pas aux enfants, c’est reconnaître leur faiblesse, a priori.
A moins de jouer les alliances, former des équipes où petits et grands seront associés. Plus un jeu fait appel  à des compétences différentes – dessiner, mimer, mémoriser dans Le temps presse
par exemple – mieux chacun trouvera sa place et son plaisir. Cela met tout de suite de l’ambiance, aussi ; mais il faut être assez nombreux, pour constituer des équipes équilibrées.


Il existe aussi des jeux dits coopératifs où tous les joueurs sont unis contre un adversaire imaginaire. On perd ou on gagne tous ensemble. Les enfants connaissent presque tous le Verger (Haba) – Cueillette de fruits dans les petits paniers avant que le corbeau ne les mange – ou le Loup (Nathan, auteur Cilou Zelkine) – en chantant la comptine "Loup y es-tu ?, arriver au but avant que le loup qui s’habille ne sorte du bois. En fait il existe des jeux coopératifs pour tous les âges, certains cependant sont ennuyeux comme la pluie, à force de bons sentiments et d’intentions éducatives (souvent bio ou écolo).

Pascal Deru, propriétaire du magasin Casse-Noisettes en Belgique, et auteur du livre Le jeu vous va si bien, a créé T’chang 
(Lucioles à ramasser, animaux venimeux à éviter, « pas de salut tout seul! Si les joueurs ne s'entraident pas, il est vraisemblable qu'ils resteront prisonniers de la tombe impériale ».)

Mais jouer en famille, ce n’est pas seulement se regrouper autour d’un jeu de société. Faire la chasse aux œufs, coller des poissons dans le dos de papa et maman, attraper sa grand-mère avec une blague de 1er avril, jouer avec les mots, se déguiser, construire des cabanes, inventer une course aux trésors, improviser un spectacle  de cirque ou de danse (sans oublier la "vente" des tickets, surtout !) sont autant de façons de jouer en famille. 
Et même participer en téléspectateurs aux jeux télévisés, alliant esprit critique et convivialité.


Quel que soit le jeu choisi, l’important c’est le plaisir partagé et la complicité entre générations, dans un espace à part, instants précieux hors du quotidien.

3 commentaires:

  1. Ta note me rappelle un article d'un certain Jacques Henriot, sur le jeu en famille ... à quand une note qui lui rendrait enfin hommage ?

    Bravo pour ce blog dans tous les cas !

    Laurence (oui, elle !)

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  2. Bien sûr ça me démange depuis que j'ai commencé ce blog de parler de Monsieur Jacques Henriot... ! Merci de ta lecture attentive !

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