lundi 18 août 2014

Jeux érotiques 2) Les jeux sexuels


Vous reprendrez bien un peu de piment ?
L’été, vous avez le choix, dans les magasines féminins, entre les tests sur votre sexualité et les conseils pour faire renaître le désir dans votre couple supposé endormi par la routine, massages et jeux libérateurs. Jouer pour changer, jouer pour oser.
Les jeux de l’amour et du hasard
Deux dés, et vous voilà en piste : l’un dit où, l’autre dit quoi, vous n’avez plus qu’à vous exécuter.
les dés bilingues

Gages, défis et vérités : sous forme de jeu de plateau à jouer à deux ou en société. La plupart du temps, ce sont des jeux classiques, jeu de dames, jeu de l’oie ou trivial pursuit, qui sont adaptés avec des gages à exécuter quand on a perdu, et des questions intimes. On appelait ces gages des pénitences, du Baiser à la capucine (un jeu datant de la Renaissance), au Berceau d’amour, du Voyage à Cythère au Cheval d’Aristote, on en échangeait déjà des baisers coquins, dans les soirées jeux d'autrefois !


Dans les jeux de plateau, je doute qu’il y ait beaucoup de mécanismes de jeu intéressants, et de même dans les jeux de cartes, sauf peut-être le strip poker, parce que c’est le poker. Mais sans doute de bons fous rires en perspective. Et plus si affinité.

Un petit jeu de rôle qui épicera un peu les ébats amoureux
Faites preuve d’imagination, répètent à l’envi les journalistes, vous suggérant de mettre en scène des scénarios bien convenus. On joue à être la maîtresse d’école avec son élève, la prisonnière avec son geôlier, la call-girl avec son riche client… On dirait que je serais soubrette ou autostoppeuse. Tu serais le plombier, ou l’informaticien venu réparer mon ordinateur, et bien sûr je t’ouvrirais la porte en nuisette sexy… 
Changer un peu de look, se costumer juste pour rire et porter l’un sur l’autre un nouveau regard. Être complices. C’est plutôt mignon, et joyeux. Si c’est pour recoller les morceaux, ça risque aussi d’être pathétique. Jouons pour jouer, pas pour améliorer notre ordinaire…
Dans le magasin Leclerc où je fais mes courses on trouve au rayon des sous-vêtements féminins une émoustillante tenue d’infirmière. Ça m’a quand même surprise : vraiment, on peut passer avec ça à la caisse sans que personne ne bronche ? Pas de quoi fouetter un chat, c’est pour jouer.

 Le jeu a un temps, au-delà on sort du jeu
« Pas besoin de pousser la porte d’un club échangiste ou de virer SM pour pimenter sa vie sexuelle ! Avec un peu d’imagination, vous pouvez vivre des corps à corps torrides et amusants. Pour cela, il vous suffit de vous glisser dans la peau d’une autre, le temps d’une soirée. » (aufeminin.com, juillet 2012)
Dans cette dernière phrase, au double sens, voulu ou non, qui fait sourire, c’est la limite temporelle qui est importante, « le temps d’une soirée ».

Pour ranimer la flamme, peut-on jouer avec le feu ?
Parmi les 10 scénarios proposés par aufeminin.com, Nathalie-Marine Barenghi propose L’amour sous la contrainte, et voilà son commentaire :
"Si dans la réalité, c'est un acte répréhensible, dans le fantasme et le jeu, la signification en est totalement différente. Dans le monde réel, contraindre l'autre est une agression, voire un viol. Dans le jeu, au contraire, il signifie : "tu es si désirable que je ne peux te résister. Tu as un tel pouvoir sur moi que je te veux à tout prix". Et pour une femme, cela peut être très libérateur. Elle peut se laisser aller à faire des choses qu'elle n'aurait jamais osées, puisqu'elle y est obligée. Mais attention, cela doit toujours rester un jeu et les deux partenaires doivent être totalement consentants sur le scénario. Sinon, cela pourrait devenir très désagréable." Si c’est du jeu, tout est permis ?

« Cela doit toujours rester un jeu »
Mais quand passe-t-on du Pour faire semblant  au Pour de vrai, du monde du jeu au monde réel ? Si le jeu c’est pour de faux, « Tu as un tel pouvoir sur moi que je te veux à tout prix » c’est vrai ? Quand les partenaires sont–ils sincères ?  Comment s’assurer de « rester dans le jeu » ? Et d’en sortir à temps, et indemne ?
Et comment définir le total consentement ? D’Histoire d’O à Cinquante nuances de Grey, on rencontre dans la fiction des femmes qui consentent librement à être maltraitées, est-ce du jeu ?
Règle et liberté sont indissociables dans le jeu. On énonce la règle avant de commencer, dans le contexte ainsi défini on peut se laisser aller, dire ou faire des choses qui ne sont pas autorisées d’habitude, mais ce n’est pas vrai que tout est permis, je ne peux pas te tuer pour de vrai dans le jeu, tous les enfants le savent. Je ne peux pas te faire mal ou t’humilier pour de vrai. Et la liberté, c’est aussi de pouvoir dire « je ne joue plus ».

vendredi 15 août 2014

Jeux érotiques 1) les sextoys


Les sextoys sont-ils des jouets ?

D’abord instruments médicaux pour soulager les patientes souffrant d’hystérie, bien féminine (hystérie-uterus), les vibromasseurs et autres godemichets ont-ils changé d’objet en changeant de nom ? Parce que, mis à part le charmant petit canard vibrant, les autres ne ressemblent pas vraiment à des jouets ! Maintenant ludiques avant tout, ils sont devenus plus accessibles. On en trouve même dans la hotte du Père Noël. Eh quoi ? C’est un jouet !



Petite histoire du vibromasseur
Dans le Elle Québec du 12 avril 2011, Carmen Jean, s’appuyant sur le livre de Rachel P. Maines Technologies de l'orgasme, relate les dates marquantes en Amérique du Nord.
"1869 Un médecin américain fait breveter des «machines de massage» qui fonctionnent à l'aide d'un moteur à vapeur. 1880 Le premier vibromasseur électromécanique à usage médical est breveté et mis sur le marché à peu près à la même époque que le téléphone et l'ampoule électrique. Le prétexte thérapeutique? «Soulager les muscles endoloris.» 1900 Pour les médecins qui désirent se débarrasser de la tâche «ingrate» de soulager manuellement leurs patientes, les modèles de vibromasseurs se multiplient sur le marché médical. On trouve de tout, des produits bas de gamme actionnés avec une pédale jusqu'à d'élégants prototypes de luxe, livrés avec leurs accessoires. 
1915 Plus besoin de prescription! Aux États-Unis, les ménagères peuvent désormais acquérir elles-mêmes un «petit appareil électroménager à usage personnel». «Grâce à lui, vous sentirez palpiter en vous tous les plaisirs de la jeunesse», promettent les réclames dans les magazines féminins. 1918 «Des outils que toute femme apprécie», dit un slogan de Sears, Roebuck and Company, qui présente sous ce titre accrocheur une machine à coudre, un mixeur et... un vibrateur. L'attirail de la reine du foyer serait incomplet sans lui !  1960-1970 Le mouvement des femmes et la libération sexuelle aidant, le vibromasseur apparaît sous toutes les formes, toutes les couleurs, toutes les tailles et toutes les textures."
«  Cette fois-ci, personne n'est dupe: un vibrateur, c'est fait pour jouir, et les femmes n'ont plus de complexes à s'en servir. Mine de rien, une révolution a eu lieu... » commente Carmen Jean. Pour jouir, ou pour jouer ?
Jouir – jouer
Une petite lettre suffit à rendre innocent, voire charmant, l’usage de ces outils de plaisir. Le jouet, c’est l’enfance, la pureté, le jeu, ce n’est pas sérieux, c’est pour rire, c’est sans conséquence.
Duckie, le petit canard innocent
En 2001, Big Teaze Toys lance son concept Toys that play with you® avec Duckie. « When this lucky Duckie burst onto the scene, he didn’t just charm your pants off with an innocent flash of his sweet gaze and snuggly Duckie body - OHHHhh no, he also started a long-awaited revolution in waterproof, personal massagers. Always the strong, silent type, he invites you to merely press on his back and the quiet motor will send delectably intense vibrations into his head and tail that immediately begin to melt away the stresses and tensions of your day. »

"Le but était à la fois d'améliorer et d'atténuer la perception ressentie face aux produits destinés au plaisir des adultes." C'est réussi. 
En France, Sonia Rykiel vend son canard dans les sous-sols de ses boutiques, et en 2005 le voilà sans vergogne en rayon chez Sephora, entre les sels de bain et les tubes de mascara.
Il suffit d’un petit canard pour accomplir ce glissement (haha) du « pas très catholique », « limite porno », pas franchement avouable, du truc qu’on fait en cachette, au « fun », qu’on se raconte entre copines, qu’on explique sans complexes sur les sites féminins et qu’on vend sur internet.

La vente de jouets d’adultes va bientôt rattraper sur le marché la vente de l’ensemble des jouets des enfants.
La vente de Sextoys en France progresse de plus de 50% entre 2010 et 2013 (Price Minister, février 2014), et le chiffre d’affaires annuel est de 22 milliards d’euros (Planetoscope), contre 36 milliards pour l’ensemble des jouets des enfants, et 70 milliards pour les jeux vidéo.
Deux, trois autres animaux mignons,  et vibrants, lapin, pingouin, chenille, ont fait leur apparition, mais la plupart des sextoys restent des objets moins poétiques, même si les fabricants font de plus en plus appel à de célèbres designers, comme en témoigne la sélection de Elle.fr. Ça ne ressemble pas à un jouet, et on ne joue pas vraiment avec (à moins de vivre chaque instant de la vie comme un jeu). On assimile plaisir et jouer, et hop ! On lève les interdits, on contourne les tabous. C’est plutôt là le jeu…




Comment on joue ?
Le petit canard, on s'en sert comment ? Certains sites plutôt reconnus, comme Femme actuelle ou Cosmopolitan, ouvrent leurs pages aux conseils et modes d'emploi. Les présentatrices ne vont pas jusqu'à faire des démos mais presque. Mais (suis-je un peu vieux jeu ?) je ne vois pas bien le jeu…
Au royaume de l’hypocrisie… 
Le petit canard a permis de parler plus ouvertement du plaisir, notamment du plaisir féminin, tant mieux. Curieusement, certaines journalistes, certains forums, ont tendance à ériger des règles (c’est normal pour un jeu) qui maintiennent l’usage de ces jouets dans les limites d’une certaine moralité, préconisant les jeux avec ces sextoys en couple, pour raviver les sentiments en même temps que les sensations des partenaires. Je n’approuve pas l’idéologie sous-jacente, le tabou des plaisirs solitaires, mais puisque nous parlons de jouer, j’aime bien cette idée : le jeu, ça se partage. 

D'ailleurs, c'est mon petit 2 : les jeux sexuels. (à suivre)