Mentir, c’est mal.
Ne me mens pas, sinon le Père Noël ne passera pas! »
Entre 3 et 6 ans, les enfants affabulent beaucoup. Mais nous, sous prétexte de les faire rêver, de les aimer, que faisons-nous ?
Si je ne me posais pas cette question fondamentale, la confiance, j’adorerai Noël et toutes ses traditions, sans conditions. Magnifique période de jeux collectifs où depuis un siècle nous jouons tous (ou presque) en même temps au jeu du Père Noël, et dix jours plus tard à la galette des rois.
A l’approche de l’Epiphanie, m’est revenue en mémoire la bêtise que j’ai faite l’année dernière, alors que, toute la famille réunie, nous tirions les rois. Je l’avais pourtant écrit, qu’il ne fallait pas tricher, ou, si on trichait, qu’il ne fallait pas se faire prendre*. Et voilà que j’ai foncé tête baissée. La plus petite était sous la table, sa grande soeur et son cousin, des grands déjà complices des adultes à propos du Père Noël, attendaient la distribution, leur chance. La fève était apparue à la découpe, et voilà que je prends la part avec la fève et la pose sans scrupules sur l’assiette de la petite, juste comme ça , pour lui donner le plaisir d’être reine… « Gloups » font les autres enfants, mais ils ont la délicatesse de ne pas broncher, pour ne pas gâcher la joie de la petite reine. Et moi je sens leur regard, leur interrogation, leur déception, mais il est trop tard. Deux fois nulle la grand-mère, prise en flagrant délit de tricherie, et qui ne leur a pas donné leur chance !
De toute façon, avec la galette, chacun y va de sa petite tricherie. Celui-là soulève la pâte pour voir s’il a la fève, celui-ci y plante sa fourchette. Celle-là, timide, l’avale ou la cache pour ne pas se distinguer, et cette autre, une fois la fève trouvée, laisse sa part de galette sur le bord de l’assiette, sans la manger.
C’est pourtant bon, une bonne galette, mais hors la période de jeu, là, début janvier, qui aurait l’idée de manger ce gâteau, sans fève ?
« Tu as la fève ? C’est quoi ? Montre ! » Pas toujours facile à identifier, la fève se compare avec les précédentes, passe de mains en mains, et finit souvent dans une boîte à collection.
Ce qui est bon dans la galette des rois, c’est le jeu. Tous autour d’une table, on coupe des parts égales pour chacun des joueurs, sans en laisser, et puis on distribue comme on distribue les cartes. Et chacun tente sa chance, même celui qui n’aime pas trop ce gâteau.
Alors, non, cette fois on ne trichera pas !
Si le plus jeune n’a pas la fève, il aura la gloire d’être celui qui a désigné le roi ou la reine, aux souverains de le remercier, de lui rendre hommage, de le nommer prince ou écuyer du roi.
Parce que si on apprend en jouant, si le jeu est une petite parenthèse « comme dans la vraie vie » où les enfants s’initient aux règles de la vie en communauté et aux aléas, autant apprendre à respecter les règles du jeu.
On ne peut pas toujours être le roi ou la reine, oui, c’est dur, mais aux autres joueurs de trouver des consolations, donner un gage au roi par exemple, lui faire chanter une chanson, enchaîner sur un autre jeu collectif.
A Noël, cette année, nous avons joué aux Ambassadeurs. C’est un jeu de mime qui ne nécessite aucun matériel, mais un peu de monde. On forme deux équipes. Dans chaque équipe, chacun à son tour devra faire deviner un mot à ses équipiers sans prononcer une parole, juste par le mime. Ce mot lui a été attribué par l’équipe adverse, on aura donc tenu compte des connaissances du joueur, de sa capacité à mimer ce mot, on aura donné aux adultes un mot plus difficile, mais connu des plus jeunes. Parfois ce sont des métiers qu’il faut deviner, parfois des personnages, parfois des concepts… Cela dépend des joueurs et de leurs compétences. En général on rit beaucoup, et on ne se soucie pas de savoir qui perd ou qui gagne, plutôt de voir comment celui qui mime va s’y prendre.
J’imagine que le roi et la reine de la galette auraient à se faire comprendre par le mime auprès de la Cour. Pas facile de tricher à ce jeu-là...
*Tirer les rois, le jeu du mois de janvier, janvier 2010.