jeudi 25 février 2010

Jouer avec les ombres -un petit bonheur à Nürnberg







Nürnberg, je veux dire le Salon du Jouet, c'est très grand. Douze halls à visiter en quelques jours, tels des chasseurs de champignons qui tantôt marchent le nez rivé au sol, tantôt lèvent les yeux et s'extasient devant la beauté d'un rayon de soleil à travers les arbres, parfois s'arrêtent sur un spécimen inconnu qui attise la curiosité, parfois marchent à grands pas car le terrain ne paraît pas propice à une bonne cueillette, enfin découvrent le bon coin : cèpes, coulemelles ou trompettes de la mort sont là, il n'y a plus qu'à remplir son panier, et d'avance les chasseurs déjà se régalent.
Je ne vous dirai pas encore ce que nous avons ramassé, Brieuc et moi. Quelquefois , quand on vide son panier à la cuisine, c'est la déception, tous ces champignons qu'il faut jeter car ils sont véreux ou douteux, quelquefois c'est magnifique, il faut être patient avant de les déguster. 

J'ai surtout envie de parler  du stand Il Leccio, celui de Vittorio, sur lequel nous nous sommes arrêtés juste pour le plaisir. Vittorio, c'est un fabricant de jouets en bois, mais surtout c'est un poète. Et j'aime toujours aller voir ce qu'il a inventé. Cette année, il a joué avec les ombres

Voici la réalisation de Vittorio : c'est une structure en bois qui ne veut rien dire... Il l'éclaire avec un spot, et l'ombre projetée est un magnifique portrait d'enfant. 
Sur un autre écran, on voit l'ombre d'un château avec des personnages au fenêtres, sur les tours, et quand on regarde d'où vient cette ombre, la construction en cubes qui est éclairée s'étale sur presque un mètre, les personnages ne sont pas du tout dans le château mais loin devant. Platon déjà nous racontait des histoires d'ombres trompeuses qui ne sont pas la réalité mais que nous prenons comme telles dans le Mythe de la Caverne... 


Cela nous a touchés, Brieuc et moi, car c'est un de nos dadas aussi, les ombres, et nous avons réalisé pour la ville d'Orly une exposition intitulée Jeux d'ombres il y a quatre ans. C'était une  commande des ludothèques et de Christine Mathieu. L'ombre était dans l'air, le Centre Pompidou  et  le Musée de La Villette (expo prolongée) proposaient une exposition sur le même thème la même année.


Alors voilà le jeu, d'après Vittorio :
Il faut disposer de temps, d'un espace dans un lieu où on peut faire le noir (ce qui manquait cruellement à Vittorio entouré de stands très lumineux) et où on peut laisser des choses "en plan". Il faut un écran (une grande toile blanche tendue) et un projecteur genre vidéoprojecteur qui éclaire sans baver. Et puis des trucs et des machins récupérés ici ou là. D'abord on choisit une silhouette, et on la dessine sur l'écran. Ensuite, on essaye de disposer les trucs et les machins de manière à ce que leur ombre s'accorde avec la silhouette dessinée sur la toile. 
Un jeu de patience très troublant, à jouer entre grands. Emotion garantie. D'ailleurs, Vittorio ne vend pas sa sculpture ni son ombre, il a pris tant de plaisir à la créer avec son grand fils, il ne s'en séparera jamais !


Et voilà le jeu d'après Brieuc : les vases communicants. L'ombre du vase donne l'impression de deux visages qui se font face de part d'autre. Prenez de la terre pour créer ce "vase" et découpez un profil dans du bois ou du carton épais. Quand la terre sera sur le tour de potier, évasez-la avec ce profil, vous obtiendrez une forme, qui, une fois éclairée de côté, donnera l'impression de voir 2 personnages. 

mercredi 17 février 2010

Le Carnaval autour d’une ménagère à Maastricht.

Quelques précisions sur le Carnaval de Maastricht, après consultation de nos amis hollandais.

Maastricht, c’est à l’extrême Sud des Pays Bas, pas en Hollande mais dans le Limbourg, de l’autre côté des rivières. Et Andreas, qui vient d’Amsterdam, un vrai hollandais, lui, et vit à Maastricht depuis des années,  passe pendant le Carnaval pour un étranger. Le Carnaval appartient aux Limbourgeois qui n’utilisent que leur dialecte pour tout ce qui concerne le Carnaval. Dès le 11 novembre, à 11h 11 - le 11, nombre premier, chiffre magique très présent tout le long de ces festivités -,  la machine carnavalesque se met en place, les groupes préparent leurs costumes, les journaux locaux publient thèmes et programmes, mais en dialecte exclusivement. Comme ils se costument et se masquent, les Limbourgeois se cachent derrière leur langue, et ne souhaitent pas élargir leur cercle. Qui se donnerait le mal de s’initier à se dialecte et de s’adresser ainsi à un « autochtone » se ferait répondre du tac au tac en Néerlandais. On me pardonnera donc quelques inexactitudes et mon ignorance de non initiée.



J’ai écrit que M. Carnaval est brûlé sur la place publique, mais c’est faux, heureusement pour lui, car à Maastricht c’est au Prince Carnaval, en chair et en os, parfois monté à cheval, que le gouverneur – représentant de la reine - remet en effet officiellement les clés de la ville. Celui-ci est élu parmi les nombreux princes et princesses Carnaval désignés dans les quartiers, les clubs, les associations.


Il y a bien un personnage en papier mâché qu’on exhibe pendant le Carnaval de Maastricht, mais c’est une femme, la Mooswief (la ménagère), qui a aussi sa statue en pierre sur la place du marché.  Maastricht, ville symbole de l’union européenne, honore et suit, au moins pour le temps du Carnaval, une ménagère, avec son panier de carottes et de poireaux.





Quant au mercredi des cendres, il marque un temps de transition à la fin du Carnaval : on fait encore la fête à Maastricht,  mais en tenue de ville, autour de platées de harengs (du poisson pour fêter l’entrée en Carême, peut-être ?) 


mardi 9 février 2010

Carnavals et mardi gras, jeux sages, jeux fous, fêtes enfantines ou grand défouloir.



Le cycle des fêtes traditionnelles, de l’automne au printemps, suit son cours. Les jours rallongent, la nuit perd du terrain, on s’approche de l’équinoxe – l’égalité entre le jour et la nuit. Les symboles dorés chauds et bien ronds, évoquant le soleil, laissent la place à  des représentations festives  de ce changement d’équilibre, entre la lumière et l’ombre. En période de Carnaval, les relations sociales s’inversent, les règles changent le temps d’un jeu où les patrons ne commandent plus à leurs employés, ni les maris à leurs femmes, où le maire de la ville lui-même cède le pouvoir à Monsieur Carnaval. Comme à Maastricht, où le bourgmestre lui remet très solennellement les clefs de la ville pour quelques jours. Pour enfreindre les règles, changer de peau, oser dire tout haut ce que l’on pense tout bas le  reste de l’année, masques et déguisements sont à la fois de bons moyens d’expression et une façon de se cacher derrière un personnage carnavalesque. « Ce n’est pas moi qui ai fait ça, ou dit ça, c’est Carnaval ».



Il fait encore froid, mais on sent venir la fin de l’hiver, on sort, on fait la fête. Et du plus jeune enfant aux grands-parents bien âgés, tous se déguisent pour défiler, dans les rues de Dunkerque, de Bâle ou de Maastricht -où, sur le pont, se pressent les spectateurs, eux-mêmes affublés de perruques et de chapeaux, pour regarder passer le défilé d’une rive à l’autre de la Meuse. On en profite, en groupes, en associations, en « cliques » organisées, pour critiquer les gouvernants, dénoncer un scandale, se moquer des people, et lâcher du lest. Tout rentrera dans l’ordre après le mardi gras. Monsieur Carnaval sera brûlé sur la place publique (il ne restera que ses cendres pour le Mercredi du même nom) et renaîtra un an plus tard, entouré de nouveaux masques et de nouveaux débordements.

Le mardi gras n’a pas de date fixe, il dépend de Pâques, qui dépend de la lune… (On garde un œil sur le ciel, toujours). Avant Pâques , il y a 40 jours de carême chez les Catholiques, sans viandes, sans œufs, sans gras. Et avant cette période de privation, on fait bombance une bonne fois, on finit les réserves, qui ne sont peut-être plus très abondantes, car les saloirs commencent à être vides… on a tué le cochon au début de l’automne, et les poules ne pondent pas beaucoup quand elles ne voient pas le soleil. Au moins, on fait des crêpes, avec les derniers œufs, s’il n’y a plus viande.

Le carême dans la pure tradition catholique, c’est aussi l’abstinence. D’où les folies carnavalesques, libéralités, baisers échangés… 40 jours de privations, c’est long, on a fini les réserves de gras, on fait des réserves de plaisir ! Tiens tiens, c'est peut-être pour ça, la Saint Valentin... (Le 14 février, et le Carême, cette année, commence le 17)

Le carême étant devenu beaucoup moins strict, si toutefois il est seulement respecté, les folies sont en proportion, la fête devient beaucoup plus sage.

A Paris, les collégiens et lycéens se poursuivent et se bombardent de farine et d’œufs. Protégeant souvent leurs vêtements avec des sacs poubelle, ils sont déguisés, si l’on veut, mais cet uniforme manque de fantaisie et de poésie… Quant aux enfants, ils se déguisent, oui, mais avec l’aide bienveillante des parents, qui les accompagnent à la fête mais restent en tenue de ville, eux. Sages mardis qui n’ont plus de « gras » que le nom. La règle du jeu a changé, mais on s’amuse bien tout de même. 


Mon amie Simone Gruner a publié Jeux de masques, chez Dessain et Tolra, il y a 30 ans, auquel nous avons participé, Brieuc Segalen et moi, en tant qu'animateurs d'un atelier d'arts plastiques. On y apprend à fabriquer un masque en carton à partir d'une forme en terre, on y voit de très belles photos - du carnaval de Bâle notamment, de Christophe Gruner. 

mardi 2 février 2010

Pourquoi fait-on des crêpes à la Chandeleur ?

Encore une fête mi-païenne, mi-religieuse, et pour ce qui est de la religion, mi-juive, mi-chrétienne... Allez vous y retrouver ! 


C'est pourtant simple : c'est la fête des chandelles, donc  de la lumière, qui reprend le dessus sur la nuit (A la Chandeleur le jour croît de deux heures). Mais aussi des cierges de procession pour la présentation de l'enfant Jésus et de la purification de la Vierge, sa mère, qui, selon la tradition hébraïque, amène son enfant au temple 40 jours après sa naissance. 
Chandelles, feu, lumière, purification...


Encore une fête romaine - les lupercales- ou bien Celte -fête d'Imbolc- reprise par l'église catholique pour devenir en 1372 en Avignon fête de la purification de la Vierge


Allumez les bougies, le 2 février, c'est la Chandeleur ! 


Mais pourquoi les crêpes alors ? parce qu'elles sont rondes, dorées et chaudes, comme la galette, comme le soleil... Est-ce qu'il y a encore beaucoup de farine en réserve, est-ce que les poules se sont remises à pondre avec le retour (timide) du soleil ? 


On les fait sauter avec un Louis d'or dans la main, ou un euro, en tout cas une pièce, pas un billet (ronde, brillante, dorée comme le soleil...) symbole de prospérité. 
Jeu d'adresse, et de gourmandise, jeu de chance et d'espérance en sa bonne étoile. Hop ! hop ! et bon appétit !




Rosée à la Chandeleur, Hiver à sa dernière heure ne sera malheureusement pas le dicton de l'année, ce sera plutôt : à la Chandeleur, l'hiver reprend vigueur !


http://montsegur09.unblog.fr/2009/01/31/lundi-on-va-feter-la-chandeleur/
http://www.formatage.org/branches/fetes/chandeleur/origine.html