Enfin fini, ce Mondial du foot ! On n’aura malheureusement pas souvent entendu parler de jeu, ni eu le sentiments de voir souvent des joueurs sur le terrain. Jusqu’à la finale où l’agressivité et la tension étaient telles qu’un Candide aurait pu croire que le jeu consistait à gagner des cartons jaunes ou rouges.
Quoique… Si le jeu est par définition libre, et qu’il n’y ait jeu que s’il est librement consenti, l’équipe française faisant sa mauvaise tête et boudant l’entraînement s’est peut-être montrée plus joueuse qu’on ne l’aurait dit à première vue.
Nul ne peut ignorer que derrière ces circenses se jouent d’autres parties, aux enjeux économiques disproportionnés.
Devant son écran, le téléspectateur est interpelé par TF1 : on vous pose une question, vous répondez –c’est très facile- et vous pouvez gagner … « 100 millions, c’est bien ça qu’ils ont dit, 100 millions ? ». Le gros lot, et sans prendre beaucoup de risques, un simple SMS dont on oublie vite qu’il est taxé. Mais est-ce bien du jeu ? Quand la réponse est évidente, quand le tirage au sort ne se fait ni par une grande roue qui tourne devant tous, ni par une distribution de cartes, à quel moment l’émotion de l’incertitude va-t-elle saisir le joueur de plaisir ? Il y a plus d’excitation à se demander si on obtiendra quelque chose pour nos retraites, mais qui dirait, là, qu’il s’agit d’un jeu ?
Ne parlons pas des publicités, sur le terrain, sur le moindre panneau, les maillots, envahissantes et clairement hors-jeu.
Mais gravitent aussi autour de cet événement les publicités incessantes pour les jeux d’argent en ligne. Depuis un an, avec une certaine frénésie à partir de janvier 2010, le gouvernement s’est appliqué à faire passer une loi autorisant ces jeux d’argent sur Internet L’enjeu était de légiférer avant le mois de juin et le début du mondial, afin d’autoriser les opérateurs à faire de la publicité pour leurs sites.
« Depuis plusieurs années, 3 millions de Français jouaient en ligne en toute illégalité, attirés par les 22000 sites de poker ou de paris sportifs accessibles en France... En mars 2009, le gouvernement a déposé un projet de loi afin de légaliser le jeu. En échange, les opérateurs, comme Unibet ou Betclick de Stéphane Courbit devront payer des taxes à l'Etat." (Public Sénat).
Les yeux dans les jeux, un documentaire d'Elise Aicardi, produit par Public Sénat, raconte en 52 minutes la genèse de cette loi, des auditions du Sénat aux débats à l’Assemblée Nationale.
Les yeux dans les jeux, un documentaire d'Elise Aicardi, produit par Public Sénat, raconte en 52 minutes la genèse de cette loi, des auditions du Sénat aux débats à l’Assemblée Nationale.
On s’aperçoit de la complexité de la question : en France, les jeux d’argent sont interdits, en dehors des instances gouvernementales comme la Française des jeux et le PMU. Les nombreux opérateurs de sites de jeux n’étaient donc pas domiciliés en France, et leurs gains, de ce fait, ne rapportaient rien à l’Etat. Cependant ils se faisaient connaître et fonctionnaient en toute impunité.
On pouvait soit laisser faire (dans l’illégalité), soit affirmer la loi et le monopole de FDJ et PMU avec plus de force (mais au risque de voir les capitaux s’enfuir ailleurs), soit rendre cette activité légale. Le gouvernement a choisi cette troisième solution, qui a déjà commencé à porter ses fruits : "En moins d'un mois, nous avons ramené dans la légalité plus que ce qui a été parié en un an sur le seul site officiellement autorisé dans l'ancien système", explique à Libération Jean-François Vilotte, président de l'Arjel, l'Autorité de régulation des jeux d'argent en ligne. Un million de comptes ont été ouverts. De jolis gains en vue pour l’Etat, mais aussi pour les 11 opérateurs autorisés (dont on dit qu’ils étaient tous au Fouquets à l’arrivée de Nicolas Sarkozy, mais bon…).
On pouvait soit laisser faire (dans l’illégalité), soit affirmer la loi et le monopole de FDJ et PMU avec plus de force (mais au risque de voir les capitaux s’enfuir ailleurs), soit rendre cette activité légale. Le gouvernement a choisi cette troisième solution, qui a déjà commencé à porter ses fruits : "En moins d'un mois, nous avons ramené dans la légalité plus que ce qui a été parié en un an sur le seul site officiellement autorisé dans l'ancien système", explique à Libération Jean-François Vilotte, président de l'Arjel, l'Autorité de régulation des jeux d'argent en ligne. Un million de comptes ont été ouverts. De jolis gains en vue pour l’Etat, mais aussi pour les 11 opérateurs autorisés (dont on dit qu’ils étaient tous au Fouquets à l’arrivée de Nicolas Sarkozy, mais bon…).
Comme on le voit dans le documentaire d’Elise Aicardi, de nombreuses questions, soulevées entre autres par le PS, mais aussi par certains membres de l’UMP, ont été éludées faute de temps, puisqu’il y avait une date butoir, liée au début du Mondial en juin 2010 .
Pas le temps, donc, de se demander comment protéger les jeunes (iraient-ils vraiment envoyer copie de leur carte d’identité à l’opérateur ?).
Pas le temps de s’interroger sur l’addiction aux jeux d’argent en général, aggravée par un accès libre aux sites de jeux, et parfois couplée avec une addiction à Internet. Au lieu de lutter contre cette forme d’addiction, le gouvernement n’encourage-t-il pas au contraire la consommation effrénée de ces jeux, qui lui rapportent gros ? Si la publicité pour l’alcool est, sinon interdite, du moins très cadrée, la publicité pour les jeux en ligne est en plein essor.
Pas le temps de s’interroger sur l’addiction aux jeux d’argent en général, aggravée par un accès libre aux sites de jeux, et parfois couplée avec une addiction à Internet. Au lieu de lutter contre cette forme d’addiction, le gouvernement n’encourage-t-il pas au contraire la consommation effrénée de ces jeux, qui lui rapportent gros ? Si la publicité pour l’alcool est, sinon interdite, du moins très cadrée, la publicité pour les jeux en ligne est en plein essor.
Pourtant la problématique du jeu a été intégrée dans le Plan de prise en charge et de prévention des addictions (2007-2011) du ministère de la Santé afin de favoriser le dépistage et la prise en charge des joueurs en difficulté au sein des programmes de soins des centres d'addictologie. L’addiction aux jeux d'argent en ligne existe-t-elle vraiment ? C’est la question que Caroline pose sur KUZEO.« A l’heure actuelle, deux antithèses s’affrontent. D’un côté les psychiatres qui la classent au même rang que les addictions aux drogues. De l’autre, les neuroscientifiques qui ne reconnaissent pas de processus biologique similaires entre ces deux addictions. »
Quant à la dépendance aux jeux en ligne, elle a fait l'objet de plusieurs reportages, à l'occasion de témoignages sur la brutalité des traitements de "désintoxication" en Chine. Beaucoup moins importante en Europe qu'en Asie, elle suscite cependant des inquiétudes et tandis que les uns parlent de prévention, les autres poussent à la roue (ou à la roulette).
Quel est donc le moteur qui fait jouer, jouer et encore jouer le joueur pathologique ? Si c’est gagner de l’argent, toujours et encore plus, tous ces grands opérateurs et autres dirigeants sont à traiter d’urgence !
Si c’est jouer pour jouer, il me semble qu’ils devraient trouver dans notre très riche patrimoine de jeux de plateau (jeux de société) ou d’adresse de nombreux mécanismes beaucoup plus intéressants, faisant appel aux compétences, aux complicités, à la convivialité, à l’empathie…
On dirait que le plaisir des jeux d’argent est plutôt dans le risque, grandissant, qu’il convient de prendre. Enjeu – danger, là est le plaisir. Tu peux tout perdre, te retrouver ruiné aussi bien que milliardaire, ça c’est excitant, plus c’est risqué, mieux c’est. Roger Caillois classe ces jeux dans une catégorie qu’il appelle Ilynx, les jeux de vertige. Vus de loin, à froid, ils font peur. Et la légèreté avec laquelle on facilite l’accès à des jeunes et des adolescents – prêts justement à mettre leur vie en jeu pour voir ou pour être remarqués – devrait, aurait dû, poser question.
Le leurre aussi. Jeux de hasard, ils sont supposés donner à tous la même chance, et permettre à chacun de gagner de l’argent sans peine, sans sortir de la maison, et sans s’apercevoir que l’argent file, car cela a l’air si virtuel. Egalité des joueurs, mais peut-être bien que celui qui peut miser gros, et ne craint pas trop de perdre, a plus de chances de gagner. A mise égale, il prend moins de risques. Quoi qu’il en soit, c’est l’opérateur le vrai gagnant. Comme la FDJ ou le casino.
Casino en ligne, casino en vrai, rien à voir.
Dans le plaisir du Casino, pour la plupart des joueurs, qui sont bien décidés à ne pas miser plus que de raison, il n’y a pas seulement le plaisir du risque. Il y a la sensation puérile et fort agréable de « faire une bêtise », de jouer avec le feu, d’enfreindre un tabou peut-être. Et puis le goût du spectacle et du jeu de rôle. On ne va pas au casino en tongs, on se fait beau, on s’habille, on se la joue « classe ». Le personnel un peu obséquieux, les décors, les tables de jeux ou les machines à sous, tout est là comme au cinéma. On joue à être élégant et riche; et grand seigneur, quand, après les rituels (Les jeux sont faits, rien ne va plus, Impair, passe et manque), ayant gagné à la roulette (ou au Black Jack, je ne sais pas très bien), on envoie quelques jetons au croupier en lançant un « Personnel, merci ! » de pacotille.
Les sites ont beau mettre en avant les décors, la musique et le respect de la tradition dans leurs jeux en ligne, je doute que l’internaute puisse trouver face à son écran ce plaisir-là, de jouer au casino (On dirait qu’on serait millionnaire) allié au petit bonheur d’une sortie « en bande ».
La dépendance psychologique est particulièrement tenace et il est difficile à s'en défaire. Le jeu en fait partie, comme beaucoup d'autres domaines.
RépondreSupprimerC'est pourquoi cette complicité du gouvernement avec les grandes entreprises et les publicitaires, en faveur des jeux d'argent en ligne, est inquiétante, et contestable, même si elle s'explique par la nécessité de bénéficier d'une partie des revenus des sites de jeu. Dans les années 60-70, les jeunes appelés se voyaient remettre des Gauloises en même temps que leur paquetage de soldat. Maintenant on dépense des sommes considérables non seulement pour soigner des maladies dues au tabac, mais aussi pour des campagnes publicitaires anti-tabac. (Vous mêmes en avez des bandeaux sur votre site). Un contrôle très strict des pubs d'alcool ou de tabac, mais pour ce qui est des jeux d'argent en ligne, lâchez-vous !
RépondreSupprimerPour le moment, on encourage ces addictions, on verra plus tard pour la prévention... et pour ceux qui, comme vous le dites, ont bien du mal à s'en défaire.
« Si le jeu est par définition libre…. ». Je ne suis pas du même avis. Ce n’est pas libre car il y a des règles. Tout jeu digne de ce nom a des règles donc ce n’est pas libre.
RépondreSupprimerC'est ce que Colas Duflo appelle la légaliberté. A la suite de Johan Huizenga, Roger Caillois ou Jacques Henriot qui se sont attachés à définir le jeu comme une activité libre et réglée.
RépondreSupprimerMerci, en voilà un article qui en vaut la peine d’être lu ! C'est aussi instructif et intéressant que la formation gratuite concernant l'investissement boursier que je viens juste de voir sur le site d’Élodie de gagner-argent.org!
RépondreSupprimerMerci, Chawn. J'ai écrit cela en2010. Je crois qu'il faut que je me mette à jour, comment ces 5 ans se sont passés… La suite en 2016, promis !
RépondreSupprimerJe crois que ce thème est actuel pendant tout le temps! Mais je crois que cette addiction dépend du gens et de la manière des jeux! Si vous jouez sur https://casinority.com/canada/fr/ vous ne serez pas dépendant! Je joue sur ce site et je suis satisfaite!
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